L’inflation fait des ravages en France, en particulier sur les aliments de base comme le sucre, le fromage, le lait et les œufs, dénonce notre chroniqueur Marc Touati, président d’ACDEFI. Il appelle en outre à une thérapie de choc sur les impôts.
En dépit de ce que l’on veut nous faire croire en permanence depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, la France est bien toujours en danger, en particulier sur le front des 3 “i” : inflation, industrie et impôts. Dire une telle réalité n’est aucunement du french bashing. Bien au contraire, nous aimons la France et nous voulons la sauver. Or, pour ce faire, il faut d’abord cesser le déni de réalité, regarder la vérité de l’économie française en face, mais aussi l’expliquer clairement et sans détour, de manière à pouvoir prendre les mesures qui s’imposent pour sauvegarder notre “douce France”.
Pour commencer, comme l’a dernièrement confirmé l’Insee, l’inflationfrançaise remonte, atteignant 5,9% en avril (6,9%, aux normes européennes) et restant ainsi sur des sommets depuis juillet 1985. Au cours des trois derniers mois, les prix à la consommation ont augmenté de 2,5%, ce qui tranche évidemment avec le discours officiel qui annonce une baisse de l’inflation depuis bientôt un an… en vain. Le plus dramatique, notamment pour la très grande majorité des Français, réside dans le fait que la flambée inflationniste n’est plus concentrée sur l’énergie, mais s’est généralisée à l’ensemble des biens et services.
A commencer par l’alimentation, qui est devenue le théâtre des plus fortes pressions inflationnistes dans l’Hexagone. En avril, en dépit d’une légère baisse corrective, le glissement annuel des prix des produits alimentaires a ainsi atteint 15%, contre une moyenne de 1,5% de 1991 à 2020. De janvier 2021 à avril 2023, ces prix ont flambé de 20,3%, soit la même augmentation que de novembre 2007 à décembre 2020. Autrement dit, en deux ans et quatre mois, les prix de l’alimentation ont augmenté autant que lors des treize années précédentes. Mais il y a encore plus impressionnant : le bien qui affiche actuellement le plus fort glissement annuel des prix à la consommation en France est le sucre, à savoir 50,3%, contre une moyenne de 0,7% de 1991 à 2020.
De janvier 2022 à avril 2023, les prix du sucre ont explosé de 57%, soit quasiment la même progression que lors de la période 1990-2012. Non, vous ne rêvez pas : en treize mois, les prix du sucre ont autant augmenté qu’en 22 ans. Encore plus troublant : de 1990 à 2021, les prix du sucre ont progressé de “seulement” 26,4%. Autre exemple détonnant, les prix à la consommation dans la catégorie “lait, fromage et œufs” explosent comme jamais. Pourtant protégés par la réglementation française, ceux-ci ont flambé de 25% de janvier 2022 à avril 2023, soit autant qu’au cours des 21 années précédentes et presque autant que de 1990 à 2021 (+31% en 31 ans).
Ces évolutions impressionnantes montrent l’ampleur des dégâts de l’inflation mais aussi du désarroi des Français. En effet, depuis le milieu des années 1980, ils ont été habitués à une modération des prix à la consommation, notamment dans l’alimentation. Le réveil est donc aujourd’hui particulièrement douloureux et pourrait susciter une crise sociétale durable.
Et ce, d’autant que les perspectives d’activité sont de plus en plus moribondes. Certes, on nous parle d’une réindustrialisation à grande vitesse qui va transformer la France. Seulement voilà, en dépit des annonces en ce sens depuis des années, les résultats sont sans appel : en mars 2023, le niveau de la production industrielle est équivalent à celui qui prévalait en… 1997. La part de l’industrie manufacturière dans le PIB français est tombée de 20% en 1990 à 10% en 2022. Parallèlement, le déficit commercial annuel français n’a cessé de battre des records historiques depuis le printemps 2022 et se stabilise désormais autour des 160 milliards d’euros.
Mais, comme si tout cela ne suffisait pas, les défaillances d’entreprises continuent d’exploser en France. Les chiffres très officiels de la Banque de France pour le mois d’avril 2023 font froid dans le dos : pour les petites entreprises (de 10 à 99 salariés) : + 91,1% sur un an et +54,9 % par rapport à 2019 ; pour les moyennes entreprises (de 100 à 250 salariées) : +87,4% sur un an et +34,4% par rapport à 2019 ; pour les entreprises de tailles intermédiaires (ETI : de 250 à 5.000 salariés) et les grandes entreprises : +126,3% sur un an et +65,4% par rapport à 2019.
Dans ce cadre, après avoir stagné à 7,1% au premier trimestre 2023, le taux de chômage de catégorie A va malheureusement très vite repartir à la hausse, tout comme le taux de chômage global qui est déjà à 16,5 %. Face à ces drames passés et à venir, le Président Macron vient d’annoncer une baisse des impôts pour les classes moyennes de l’ordre de 2 milliards d’euros “quand la trajectoire budgétaire le permettra”. Au regard des nouveaux dérapages des comptes publics, avec un déficit de l’Etat de 54,7 milliards d’euros sur le seul premier trimestre 2023 et de 167,9 milliards d’euros sur un an (dans les deux cas, des records historiques hors 2021), il est clair que le timing de cette promesse risque de décevoir…
En outre, n’oublions pas que, face à l’ensemble des prélèvements obligatoires qui ont atteint 1.260,6 milliards d’euros en 2022, les 2 milliards promis resteront un verre d’eau dans un océan de pressions fiscales et se traduiront au mieux par une baisse d’impôt de l’ordre de 70 euros par an par personne concernée. Là aussi, attention aux déceptions ! Alors que faire ? Comme je le soutiens depuis des années, la France a besoin d’une “thérapie de choc bienveillante” indispensable pour guérir son économie et la relancer sur les chemins de la croissance, de la réindustrialisation, de la crédibilité et du bien-être…
Présentée en détail dans RESET II – Bienvenue dans le monde d’après ou sur ma chaîne YouTube (voir lien ci-après), j’en rappellerai simplement 4 points : 1. Une baisse massive des impôts (c’est-à-dire d’au moins 40 milliards d’euros) pour tous (entreprises et ménages) mais avec 2. Une réduction des dépenses publiques et notamment de fonctionnement, qui ont encore augmenté de 22,4 milliards d’euros en 2022 (+5%), sans oublier 3. Une réduction des charges qui pèsent sur les salaires. 4. Le tout n’étant possible qu’avec un développement de la culture économique des Français. L’espoir fait vivre…
La Source: Capital