Lors d’un Comité interministériel des villes à Chanteloup-les-Vignes, vendredi, Elisabeth Borne a présenté les réponses sociales du gouvernement pour apporter des solutions à la crise sociale révélée par les nuits de violences qui ont suivi la mort du jeune Nahel, le 27 juin dernier à Nanterre, en région parisienne.
Fatiha Abdouni a fondé « Les mamans des Pablo » à Nanterre, où elle habite depuis plus de vingt ans. Elle a pris connaissance de ces mesures, mais ne les comprend pas. « J’ai l’impression que le gouvernement, il cache encore la poussière sous le tapis. Mais c’est pas comme ça qu’ils vont régler les problèmes des quartiers », regrette-t-elle au micro de Valentin Hugues, du service société de RFI.
La double peine des mamans seules
C’est surtout le volet « parentalité » qui a retenu son attention : avec des sanctions pour les parents, quand un enfant commet un acte de délinquance. « On travaille beaucoup avec les mamans ‘‘solos’’, on va dire, monoparentales, et on sait très bien à quel point elles galèrent avec leurs enfants. Maintenant, on va les culpabiliser encore plus ! Ces familles-là ont besoin d’aide, d’accompagnement, certes, mais pas de sanctions. On va ajouter un problème au problème existant, souligne Fatiha Abdouni. Hier, quand j’ai entendu parler des mesures, je me suis dit : là, on va tomber encore plus dans des difficultés ! Ça me déçoit beaucoup que le gouvernement ne voit pas les choses de la sorte. On a des problèmes qui sont ancrés, il y a beaucoup de femmes qui sont dépassées, parce que vous le savez, je ne vous apprends rien, dans nos quartiers, il y a beaucoup de femmes qui exercent des métiers pénibles, des métiers précaires, ça peut aller de 5 heures du matin jusqu’à 22 heures. Ce sont des femmes qui travaillent dur et qui vivent de très peu, et là, leur ajouter encore un problème sur le dos, je trouve ça vraiment déplacé ! »
Début septembre, on a organisé deux petits déjeuners, rappelle Fatiha Abdouni. « On a invité beaucoup de femmes » auxquelles l’association a demandé de noter sur un tableau ce qu’elles souhaitaient et « La première chose qui était notée, c’était ‘‘aidez les femmes isolées’’. On a besoin que nos enfants, ils soient mieux cadrés à l’école. Quand on a besoin d’une orthophoniste, il faut qu’on la trouve, quand on a besoin d’une psychologue, il faut qu’on la trouve. Et dans le gouvernement, les premières personnes qu’ils tapent, c’est les femmes isolées. Elles ont besoin d’accompagnement, d’aide, pas de sanctions. La sanction, elle est tellement facile, je crois. »
Un constat partagé par Hamayé Konaté, directeur d’une association d’accueil et d’écoute à Montreuil. « Les parents, il faut pas se mentir, ils se battent au quotidien pour en tout cas, faire en sorte que leurs enfants puissent avoir une vie meilleure. » Ces deux associations regrettent que l’État ne les ait pas consultées avant de présenter ces mesures.
Santé : aller vers les publics qui renoncent aux soins
Élisabeth Borne a évoqué les questions de santé publique, relève Abdelaali El Badaoui, président de l’association Banlieues Santé, au micro de Sylvie Koffi. « Il y a eu des mesures, effectivement, qui ont été proposées, on va voir comment elles peuvent se déployer sur le court terme et sur le long terme.
Ce qui a été évoqué, ce sont les centres de santé participatifs, qui vont être déployés, multipliés. Alors les centres de santé participatifs, ce n’est pas uniquement des professionnels de santé, il va aussi y avoir tout un volet psychosocial qui va être pris en compte. Et pour nous, c’est une victoire, parce qu’avoir un accompagnement global et holistique de la santé, c’est ce qu’on demande depuis le début, pour pouvoir vraiment embarquer un certain nombre de publics en angle mort des politiques sociales et des politiques publiques et de santé. Et puis aussi, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, l’a annoncé, de la médiation en santé pour faire de ‘‘l’aller vers’’, aller chercher les publics qui renoncent aux soins. Il faut que les acteurs associatifs soient formés sur la médiation en santé. »
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